parfois, tout ce dont on a besoin, c'est d'une seule personne...
24 décembre 1986;

Un bébé est né en ce 24 décembre, jour hivernal et particulièrement froid. Ce bébé, c'est moi. Pourquoi ? Je ne sais pas, où ? Dans un hôpital aussi prestigieux que ma luxueuse demeure... Celle dans laquelle mes parents m'ont élevé. On dit toujours que les années passent trop vite, vous savez, et on ne s'en rend pas compte, pourtant c'est vrai. D'aussi loin que je me souvienne, je ne me suis jamais vraiment poser de questions sur mon enfance. Pour tout vous dire, je ne sais pas si j'ai vraiment eu une enfance. En Grèce, le fonctionnement est différent, surtout quand nos parents ont de l'argent. Je n'y suis pas restée longtemps, peut-être une dizaine d'années, puis mes parents ont décidé de m'expédier chez ma tante, la sœur de ma mère, parce qu'ils ne voulaient pas que je devienne comme ma mère... Non, en fait, c'est parce que ma mère ne voulait pas que je devienne comme elle. Rien n'était rose dans ma petite famille, contrairement à ce que les gens pensaient. Je n'étais pas une petite fille heureuse de vivre et dynamique. Je cachais simplement mon jeu derrière mon sourire, pour ne pas que les gens posent des questions. Pour ne pas avoir à faire face à tous mes démons. J'étais égoïste, certes, mais je m'en fichais. Tout ce qui comptait, c'est que je m'en sorte, et que je décide de tourner la page.

Je n'ai jamais rien dit à personne sur les problèmes familiaux qu'on avait à la maison. Ça ne les concernait pas de toute façon et ça n'aurait servi à rien, parce que j'aurais écopé de la colère noire de mon père, celle qui m'effrayait depuis tant d'années, et ma mère m'en aurait sûrement voulu. Je ne sais pas comment décrire notre situation passée, parce que j'en ai honte, et qu'aujourd'hui, ça ne fait plus du tout partie de ma vie. Les gens ne comprennent pas quand je ne dis pas les vrais mots. Les gens essaient d'être sympathiques – pour ceux qui ont compris – et ça ne fonctionne pas, parce que je me souviendrais toujours de l'expression sur le visage de ma mère lorsqu'elle m'a expliqué ce qui se passait un soir. J'étais une gamine, je ne voulais pas avoir à l'entendre, et certainement pas venant de l'homme que j'admirais... Mon modèle, mon idole. Si vous ne l'avez pas compris, mon père battait ma mère... Vous n'avez pas idée d'à quel point cette histoire m'a affecté personnellement. Je ne me suis jamais ouverte aux gens à cause de ça et mon père ne s'en est jamais senti coupable... Et puis les années ont passé, je me suis retrouvée en Angleterre, au lieu de continuer de vivre en Grèce. J'y ai laissé le peu d'amis que j'avais, et ma mère toujours aussi fragile... En vivant en Angleterre, j'ai appris l'anglais meilleur que celui enseigné en Grèce, j'ai su comment m'extérioriser, comment manipuler les gens et faire en sorte qu'ils ne veuillent pas en savoir trop sur moi. Et puis j'ai appris à sourire. Sourire pour cacher mes vraies émotions. Tout ça m'a permis d'avoir une belle vie, jusqu'à temps que j'atteigne l'université.

Ma mère est morte... Après toutes ces années de malheur, elle est morte. Sûrement mon père qui l'a tuée, en se couvrant, évidemment. Parce que personne ne savait ce qui se tramait à la maison. Mon père, ayant beaucoup d'argent, a sûrement dû tout couvrir avec ses moyens. Je le déteste pour ça... Je ne lui parle même plus depuis que je suis partie de Grèce, trop honte de lui j'imagine... J'ai fini par me noyer dans tout ce qui était mauvais pour tout le monde. Je me disais que je ne voulais plus vivre. Ma mère était mon pilier, mon héroïne, mon centre. Je lui parlais tous les jours par n'importe quel moyen qu'on trouvait, et puis elle s'est éteinte. Je ne l'ai jamais pardonné à mon père, et je ne lui pardonnerais certainement jamais. La rancune que j'ai envers lui rend cet acte – qu'est le pardon – impossible. De toute façon, il s'est trouvé une autre femme sur qui taper, et elle je m'en contre balance. Elle n'a qu'a manger tout l'argent de mon père, et quand il sera seul au monde, il comprendra ce qu'il a fait. Toujours à l'université, j'ai rencontré un homme qui m'a fait chaviré. Il a complètement bouleversé mes valeurs, mes points de vue, ma vie, mon cœur, absolument tout. Devon Phipps. Ce beau blond m'a charmé dès les premiers regards que je lui ai lancé. Mais ce n'était pas si simple que ça paraît. Il sortait avec une fille, et cette fille était mon amie. Je ne voulais pas la blesser, alors je ne lui ai jamais dit que son petit-copain me plaisait énormément, peut-être même trop pour que je veuille rester seulement son amie. Je me suis contentée d'être silencieuse, comme j'avais si bien l'habitude de le faire. Je n'avais jamais été en couple avant. Je le refusais parce qu'à chaque fois que je pensais à une relation sérieuse, je pensais à mon père et ma mère, et ça me repoussait face à l'amour.

Quelques mois plus tard, mon amie m'a annoncé qu'entre Devon et elle, c'était fini. Je ne savais pas comment réagir, du coup je lui ai dit qu'elle trouverait mieux, et elle m'en a voulu. Elle m'a reproché d'avoir des sentiments apparents pour lui. Je ne peux pas dire que c'était faux, parce que c'était loin de l'être. Je n'ai rien dit, je me suis effacée et je l'ai laissé m'en vouloir. Elle m'a dit que j'étais la pire des amies que l'on pouvait avoir, pour lui avoir menti comme je l'avais fait. Je ne voulais pas lui mentir, je ne lui ai pas menti. J'ai seulement omis de dire que j'étais amoureuse de son copain parce qu'elle l'aimait, et qu'il l'aimait, et que je ne voulais en aucun cas me mettre entre eux. Je les aimais, tous les deux, et je ne souhaitais que leur bonheur. Même si dans mon fond égoïste je voulais qu'il la quitte et qu'il réalise que j'étais faite pour lui. Quand on y pense, je n'ai fait que l'éclairer sur ce qu'il lui fallait, et c'était moi. Je n'ai pas vraiment attendu avant de me lancer sur lui. Je m'étais retenue pendant plus de 7 mois, par respect pour Lyla. Je ne lui devais plus rien, après tout, c'était elle qui m'avait traitée de tous les noms, parce qu'apparemment je ne respectais pas le code d'honneur des filles. Je n'en ai rien à foutre, de ce code. Je n'ai pas l'intention de me sacrifier à cause d'une fille comme elle. Quoi qu'il en soit, Devon m'a avoué qu'il n'avait jamais vraiment été amoureux de Lyla. Parce qu'on s'était rencontré en même temps, et que Lyla avait eu le courage de se jeter avant, d'où le fait qu'elle était la première à avoir eu Devon. Je ne me suis pas retenue de lui dire que je ne voulais plus être son amie... C'était bien trop compliqué, et bien trop dur. Quand on sortait pour aller en boîte, je voyais toutes les filles le coller, et je n'y pouvais rien, parce qu'officiellement, je n'étais pas sa petite-amie, et je n'avais pas mon mot à dire... Encore une fois, j'ai obtenu ce que je voulais. Devon et moi nous sommes mis ensemble et je ne pouvais être plus heureuse que je le suis actuellement... Mais tout n'est pas tout rose non plus. J'aime Devon, j'en suis éperdument amoureuse... Mais dernièrement, j'ai commencé à travailler au journal. Parce qu'après ma dépression, je me suis reprise et je savais que j'avais beaucoup plus d'ambition que je me laissais voir. Je suis devenue journaliste, et j'ai prouvé aux gens qui me croyaient stupide que je pouvais faire bien mieux que la plupart d'entre eux. Tout ça pour dire qu'il y a quelques mois j'ai dérapé. Déraper c'est normal, quand on vit une vie normale et tout, on ne peut pas toujours faire les bons choix, et on fait souvent plus d'erreurs que de bons choix. J'ai fait un choix, et je ne sais pas s'il est mauvais, ou s'il est bon en tant que tel. Il est beau, ses yeux bleus m'ont envoûté depuis quelques mois et je ne peux plus me passer de sa présence. Et dire que c'était une question de travail. C'était pour une tâche que notre patron nous avait imposé... Je ne savais pas que le journalisme, et le journaliste lui-même pouvaient me passionner autant. Effectivement, Ethan est l'homme caché derrière le magnifique sourire et les yeux bleus comme la mer. Je me déteste de l'aimer, pourtant, je continue de le faire... J'aime Devon, mais j'aime Ethan. Je suis fiancée depuis peu à Devon, et je ne sais pas si c'est parce que je prévoyais éviter de tomber amoureuse d'Ethan que j'ai décidé de l'épouser. Après 3 ans de liaison, c'est normal d'être fiancée et enceinte de l'homme qu'on aime ? Sauf que quand cet 'homme' se dédouble en deux hommes, on ne sait plus où donner de la tête. Malheureusement pour moi, je suis enceinte – c'est une bonne nouvelle – mais pas de l'homme dont je voudrais l'être. Je ne suis pas enceinte de mon fiancé, pourtant il le croit, et je le laisse croire ça parce que je ne veux pas qu'il me quitte. Je l'aime, et je sais que c'est égoïste de ma part de faire ça... Mais je ne peux pas m'en empêcher.